Cry Macho
Dans un Mexique en bande dessinée, le plus brave des "gringos ", même s'il a dépassé les 90 balais, se tire toujours des mauvais pas. Normal, c'est notre Clint Eastwood préféré qui lui donne chair en ex-champion de rodéo missionné par son ancien patron. Ce dernier entend bien récupérer son sauvageon de fils et le faire ramener au Texas, quoiqu'en disent la pègre mexicaine et la police des frontières.
L'affaire est aussi rondement que nonchalamment menée. Le môme turbulent n'est pas si enragé qu'il en a l'air, sa jeune mère entourée de gangsters est suffisamment défoncée pour oser faire des avances à celui qui pourrait être son grand-père, des chevaux réputés sauvages se laissent comme par miracle amadouer au contact du vieux cowboy solitaire et ce dernier se permet même de faire le coup de poing lorsqu'on l'enquiquine un peu trop.
Vous avez dit crédibilité ? On s'en fiche. Seule comptent ici la mythologie, les soleils couchants dans le désert, les airs de guitare qui vont avec et le lien fantasmagorique qui unit le dernier des géants à son public. Aussi râleur, ridé et minéralisé que dans Gran Torino et La Mule, Clint Eastwood brave une fois de plus la faucheuse qui n'en revient pas de le voir toujours aussi en forme. Et nous, on en redemande, envoûté par ce que le réalisateur-acteur fait advenir à l'écran malgré une intrigue assez sommaire.
Ce qu'il advient, c'est une sorte de pastorale crépusculaire comme en apesanteur dont le héros, revenu de tout, tente encore de transmettre ce qu'il peut. Au gamin qu'il escorte, il enseigne que "ce truc de macho, c'est surfait ", ou encore: "tu penses parfois avoir toutes les réponses dans la vie, mais en vieillissant, tu comprends que tu n'as aucune réponse et à ce moment-là, c'est trop tard "... Plus question désormais de creuser les racines du mal, Clint est ailleurs et c'est tant mieux, surtout quand il trouve le repos du guerrier dans le bistrot déglingué d'une veuve mexicaine entourée par toute une smala.
Là encore, on gobe à 200% cette envie de faire communauté sur fond d'improbable romance façon Sur la route de Madison. Aucune surprise, certes, mais un plaisir constant et nimbé de contingence devant le grand écran là où le précédent Eastwood, Le cas Richard Jewel, suscitait un certain malaise malgré un matériau plus solide. Même le valeureux coq ironiquement baptisé Cry Macho et qui sert de mascotte à toute cette aventure, il nous fait craquer. Lui aussi, il a encore une sacrée vigueur...
Cry Macho, de et avec Clint Eastwood. Sortie en salles ce mercredi 10 novembre. Coup de projecteur le même jour, sur TSFJAZZ (13h30), avec David Speranski, critique et directeur de la rédaction du site MovieRama.