Vendredi 20 février 2009 par Ralph Gambihler

Gran Torino

Dans l'église où il enterre sa femme,  Walt Kowalski rugit intérieurement lorsqu'il voit débarquer sa petite-fille ultra-maquillée   et avec un piercing sur le nombril...  Il aurait aimé un peu plus de dignité vu les circonstances... Tout est dit dés cette première séquence de "Gran Torino": à la fois le côté sombre du film, mais aussi son allure presque burlesque parce que Kowalski, c'est Clint Eastwood lui-même, derrière et devant la caméra, dans un rôle de vieux réac qui sonne comme une parodie de tous les redresseurs de tords qu'il a incarnés dans le passé.

On le comprend très vite en fait: Walt Kowalski, ce vétéran de la guerre de Corée qui a travaillé chez Ford et qui désormais cuve sa solitude en grognant contre sa famille, les jeunes en général, et les étrangers n'en parlons pas, c'est un peu l' inspecteur Harry qui aurait mal vieilli... Et ce qu'il y a d'inénarrable dans ses rugissements intérieurs, c'est que le spectateur les entend !  Alors on rit en effet... On rit comme on n'a jamais aurant ri dans un film de Clint Eastwood. L'icône se moque d'elle-même et pratique l'auto-déglinguage avec une virtuosité jubilatoire.

Et puis, peu à peu, le film se laisse envahir par autre chose. Car dans "Gran Torino", Eastwood  n'affronte plus les mafias proliférantes et autres gangsters de haut vol... Non, ce sont désormais des jeunots, des minables bandes ethniques,  qui lui donnent du fil à retordre, surtout lorsque l'une d'elles s'en prend à un gamin asiate initié par la bande en question et que Kowalski a surpris en train d'essayer de voler sa voiture (la fameuse Gran Torino utilisée par Starsky et Hutch) ... En découvrant la famille de l'ado, issue de la communauté Hmong, Kowalski va voir du même coup ses préjugés racistes fondre comme neige au soleil...

Mais comme le note si bien le critique Noël Simsolo, que TSFJAZZ a interviewé pour le coup de projecteur qui sera prochainement consacré à "Gran Torino", le personnage joué par Eastwood n'a que faire d'une quelconque rédemption personnelle... Son obsession, c'est d'en finir avec la gangrène. Contre celle qui dévaste son corps, il ne peut plus rien. Mais contre les petites crapules qui veulent démolir un gamin; contre la médiocrité, la rapacité et la mise à mort d'une certaine authenticité made in America ( ce que symbolise très bien l'état d'abandon de la pelouse dans le pavillon des voisins nords-vietnamiens ), Clint est prêt de nouveau à sortir la carabine, mêle s'il n'y a plus de cartouches dedans... La sérénité bouleversante avec laquelle tout cela est filmé dément définitivement le caractère soi-disant mineur de "Gran Torino".

Gran Torino, de ClintEastwood (Sortie en salles le 25 février). Interview de Jamie Cullum, qui a composé la musique du film, le mardi 24 à 19h. Coup de projecteur avec Noël Simsolo le même jour à 8h30, 11h30 et 16h30.