Memory
Distant, abscons, peu aimable, complaisant, doloriste... Les épithètes les moins avenantes (et parfois contradictoires) ont souvent jalonné la filmographie du réalisateur Michel Franco malgré des réussites aussi indéniables que Chronic et Sundown. De ce que l'on croit déjà entrapercevoir, son dernier-né, Memory, devrait quelque peu élargir l'arc du consensus le concernant, surtout avec Jessica Chastain comme pièce maîtresse et dame de cœur.
La comédienne incarne ici une travailleuse sociale et mère monoparentale débarrassée des anciennes addictions qui l'ont amenée à fréquenter les alcooliques anonymes. Jusqu'à sa rencontre, lors d'une réunion d'anciens camarades de classe devenus adultes, avec un homme (Peter Sarsgaard),qui se met à la suivre et dont on comprend relativement vite qu'il est atteint de démence. Hostilité, méfiance, complicité, amour... Michel Franco met en scène avec tact tout ce qui va rendre ce duo de moins en moins dissonant.
On l'a connu néanmoins plus suggestif. Lorsqu'il plonge dans les traumas passés du personnage féminin principal violé à huit ans et qui imagine à tort que son ancien camarade de classe est l'un de ses agresseurs, le réalisateur a la patte plus lourde, surtout quand, à l'ombre d'une mère particulièrement toxique (Jessica Harper), les aléas de la mémoire se solutionnent dans une grande scène d'explication.
Le récit est loin d'être désagréable, et l'émotion n'est pas absente. On se prend néanmoins à regretter la présence à la fois si douce et si spectrale de Tim Roth, jusqu'ici l'acteur fétiche de Michel Franco. En lieu et place, on se tartine à plusieurs reprises l'inénarrable et antédiluvien A Whiter Shade of Pale du groupe Procol Harum. On aurait rêvé meilleur deal...
Memory, Michel Franco (Sortie en salles le 29 mai)