Sundown
Le regard doux et vide, les mouvements d'un spectre, la dégaine passe-partout même si le monde s'écroule autour de lui... On reconnaît ce profil. Après l'implacable Chronic où il campait un aide-soignant dépressif confronté à des malades en phase terminale, Tim Roth s'impose une nouvelle fois comme l'acteur-partenaire du réalisateur mexicain Michel Franco dans Sundown, récit encore plus concis (1h23) sous le soleil poisseux d'Acapulco.
Les tropiques de la célèbre cité balnéaire offrent pourtant une image idyllique au départ. Une riche famille anglaise y passe des vacances de rêve: transat, margaritas... Dolce Vita à peine troublée par d'étranges comportements: Tim Roth contemple des poissons agonisant sur le pont d'un yacht. Charlotte Gainsbourg, qui l'accompagne, est vissée à son téléphone. Mauvais présage. Un coup de fil lui apprend la mort de sa mère. Il faut abrègrer le séjour. Sauf qu'une fois à l'aéroport, Tim Roth doit retourner à l'hôtel. Il a oublié son passeport. Tant pis. Il rejoindra les siens lors du vol suivant.
Il ne rejoint personne. Il ne revient pas à l'hôtel. Le passeport, c'est du vent. Échoué dans un motel minable qu'aucune carte postale d'Acapulco ne vient cette fois-ci immortaliser, Tim Roth s'acoquine avec une jeune femme de la région. Elle vend des bières. De toute façon, il n'arrête pas de boire des bières. Lorsqu'un homme est abattu sur la plage où il est venu se prélasser, il reprend même une autre gorgée.
Cynisme ? Apathie ? Fuite en avant ? Ces différentes hypothèses s'agrippent au jeu minéral de l'acteur britannique quand les traits crispés de Charlotte Gainbourg, qui réapparaît plus tard dans le récit, font écho à des fléaux plus tangibles: affairisme, violence sociale... Toute en vraie fausse froideur, la mise en scène insère sans crier gare les pièces manquantes de ce puzzle d'Acapulco jusqu'à en renverser complètement la donne initiale. Un ultime changement de focale le rend encore plus prenant, au diapason d'un Tim Roth passager de son personnage tout en lui offrant, au stade suprême du détachement, un fascinant mélange de tendresse et d'humanité.
Sundown, Michel Franco (Sortie ce 27 juillet)