Samedi 7 avril 2012 par Ralph Gambihler

Low Life

Outrecuidant et exténuant "Low Life" ! Nicolas Klotz et Elizabeth Perceval, qui nous avaient pourtant habitué à tellement mieux en matière de cinéma politique ("La Question Humaine", 2007), viennent d'envoyer sur un grand écran un pétard mouillé du plus sinistre effet.  Pas une seule image, pas un seul plan, pas une seule phrase ne sonnent juste dans "Low Life" alors qu'on ne demandait à-priori qu'à plonger dans l'univers de ces jeunes artistes contestataires lyonnais vivant d'amour et de matraque fraîche (celle en l'occurrence des CRS qu'ils affrontent au début du film) tout essayant de venir en aide à des sans-papiers.

D'entrée de jeu, malheureusement, on comprend que les deux réalisateurs n'ont pas fait le choix de la limpidité et de l'émotion brute pour mettre en scène leur propos. Sous couvert de grand mix entre poésie et engagement militant, les acteurs parlent comme dans les films de Godard, Eustache, Philippe Garrel et Robert Bresson, ce dernier étant explicitement assumé comme référence à travers son film de 1977, "Le Diable probablement". Le résultat fait peine à voir. Pompeux et spécieux, desservi par un casting dans lequel de jeunes bourges à peine dépucelés du cours Florent ne parviennent même pas à jouer leurs propres rôles, "Low Life" s'enlise dans une romance à laquelle on ne croit pas un instant entre l'une des jeunes manifestantes et un poète sans-papier afghan.

Les choix esthétiques du film ne sont guère plus pertinents: rites vaudous, boucles new wave, ambiance nocturne et crépusculaire... Que tout cela est lourd, hiératique, fonçant sans cesse dans des portes ouvertes, et au final parfaitement inoffensif, sauf à maudire les auteurs pour le puits d'ennui dans lequel ils jettent le spectateur. Amis de la revue "Transfuge", qui consacrez 12 pages (!!!) à ce nanar sans nom que le reste de la presse, à quelques exceptions près, a soigneusement descendu comme il le fallait, vous faites fausse route.

Dans votre guerre contre l'art "rétrograde" vous encensez un film aussi vieux jeu que les avant-gardes les plus surfaites. Vous y voyez un état des lieux des années Sarkozy qui présente autant d'intelligence politique qu'un tract de Lutte Ouvrière.Vous cherchez le fameux "film-culte de toute une génération" en confondant, au passage, "Low Life" et "Mauvais Sang", de Léos Carax. Vous laissez Nicolas Klotz, dans vos colonnes, citer Maurice Pialat quand ces deux univers sont le jour et la nuit. Vous faites à nouveau appel, pour finir, à cet escroc de Yannick Haenel qui, non content d'avoir dénaturé le souvenir de la Shoah dans son infâme "Jan Karski", trouve à  "Low Life" des accents rimbaldiens !!! De quoi recevoir un troisième trou rouge au côté droit

"Low Life", de Nicolas Klotz et Elizabeth Perceval (le film est sorti en salles le 4 avril)