Le Gamin au vélo
On a vraiment envie de lui offrir un antivol, au "Gamin au vélo" des frères Dardenne. On mesure, en même temps, que si ce garçon passablement agité avait un antivol, ce qui relève quand même de l'évidence vu que son vélo, on n'arrête pas de le lui voler, il n'y aurait plus de film...
Le 2ème problème, c'est la scène de la voiture: Cécile de France, qui joue ici une coiffeuse en mal de maternité, semble-t-il, s'engueule avec son mec au sujet du gamin au vélo, avec lequel elle ne serait pas assez sévère, et qui prend trop place dans leur vie de couple. Survient l'ultimatum: "C'est lui ou c'est moi", s'exclame le petit ami de la coiffeuse... "C'est lui", répond Cécile de France... L'acteur n'est pas bon. La scène sonne faux. Et là aussi, comme pour l'affaire de l'antivol, on commence à soupçonner un sérieux coup de fatigue pour les frères Dardenne.
Oh, bien sûr, il y a de très beaux moments dans ce récit d'apprentissage... On a trop aimé les flux et les frémissements de "L'Enfant" et "Le Silence de Lorna" pour ne pas admirer le fil tendu d'une mise en scène qui parvient, encore une fois, à capter des moments de cruauté inouïs sans jamais en faire des tonnes. Le rejet du gamin par son père (magnifique Jérémie Renier) participe de ce trou noir des sentiments dans lequel les deux frangins belges excellent...
Les 20 dernières minutes du film sont pareillement admirables, ne serait-ce qu'à travers cette fameuse scène de "résurrection" filmée dans un cadre complètement inédit. Il n'empêche que dans l'ensemble, le rythme, la mollesse et les facilités d'un style un peu trop rodé autorisent désormais à questionner l'avenir d'une oeuvre condamnée, peut-être, à se transcender dans des formes radicalement différentes de celles que l'on commence à connaître par coeur.
"Le gamin au vélo", de Jean-Pierre et Luc Dardenne (le film est sorti en salles le 18 mai)