Grisgris
Trop de joliesse, malheureusement... Trop de schématisme, surtout, dans "Grisgris", le nouveau film du réalisateur tchadien Mahamat-Saleh Haroun. C'est pourtant le même cinéaste qui avait été, à tellement juste titre, récompensé par un prix du Jury à Cannes il y a deux ans pour "Un Homme qui crie", un drame de la filiation et de la mondialisation sur fond de guerre civile.
Dans "Grisgris", Mahamat-Saleh Haroun tente une nouvelle fois de varier ses angles d'approche mais la mécanique parait, cette fois ci, plus artificielle. Si la caméra s'attarde dans un premier temps sur l'abnégation de Grisgris, un jeune danseur qui, malgré sa jambe paralysée, se donne à fond sur la piste, chaque soir, dans les bas-fonds de N'Djamena, le scénario passe rapidement à autre chose. C'est ainsi que pour soigner son beau-père et financer des frais élevés d'hospitalisation le danseur se transforme en trafiquant d'essence, à ses risques et périls.
Nouveau changement de décor dans le dernier tiers du film lorsque notre héros, qui s'est entiché d'une prostituée métis aussi déclassée que lui, trouve refuge dans un village de femmes qui sauront manier le gourdin au moment où la pègre africaine menacera Grisgris et sa dulcinée... Le sens de l'espace et la beauté quasi-graphique de certaines séquences rappellent les qualités de metteur en scène de Mahamat-Saleh Haroun. Ces personnages, en revanche, le trahissent. Jamais ils ne se déploient hors des clichés dans lesquels le spectateur les appréhende. La pauvreté des dialogues n'arrange rien, sauf à nous faire rêver d'un récit qui aurait pu exclusivement être traité sur un mode documentaire tant l'amaigrit le régime de la fiction.
"Grisgris", de Mahamat-Saleh Haroun (Sortie en salles le 10 juillet)