Dimanche 28 juin 2009 par Ralph Gambihler

Whatever Works

Le titre du film en suggère un peu la morale: on trouve toujours chaussure à son pied, nous dit  Woody Allen... Pour illustrer ce propos sorti tout droit du café du commerce, le réalisateur fan de Carla Bruni a exhumé de ses fonds de tiroir un scénario écrit à l'époque d' "Annie Hall "... C'est ce qui explique sans doute l'odeur de renfermé qui nous saisit durant tout le film. A vrai dire, tout est exaspérant ici, à commencer par le personnage principal, un vieil hibou acariâtre qui déteste la terre entière...

L'acteur qui joue le rôle nous ferait presque regretter l'époque où Woody Allen incarnait lui-même à l'écran ce type d'intello névrosé auquel il donnait une véritable humanité... Déjà accablé par le manque de finesse qui s'empare des premiers plans, il nous faut par ailleurs supporter les monologues au marteau-piqueur du personnage qui s'adresse directement au public dans la salle.

Le procédé est rapidement fastidieux, même si Woody Allen en avait déjà fait, il y a un bon quart de siècle, la matrice de la sublimissime "Rose Pourpre du Caire "... Pas un seul gramme de grâce, hélas, dans "Whatever Works "... Voilà que débarque, soudain, dans l'univers du vieil hibou misanthrope, une belle ingénue venue tout droit de la Nouvelle-Orléans. Evan Rachel Wood, qui joue le rôle, est croquante à souhait, mais pour quelle raison Woody en a t-il fait une nunuche aussi invertébrée ?

Le pire survient lorsque débarquent les parents sudistes et complètement coincés de la demoiselle, lesquels vont se déniaiser dans la bonne  branchitude new-yorkaise : elle dans les parties de jambes en l'air à trois, lui  dans l'homosexualité.... On trouve toujours chaussure à son pied, effectivement... On trouve surtout de plus en plus insupportable le mépris à la limite du racisme dont fait preuve le réalisateur de "Manhattan " à l'égard de tout ce qui vient de près ou de loin du Mississipi. Rarement en tout cas on l'a vu aussi abject et aussi caricatural à l'égard de ses personnages.

Le jazz est de retour, certes, dans les BO alléniennes, mais là aussi sans réelle originalité, comme en témoigne la reprise mille fois entendue de "Desafinado" par Stan Getz et Charlie Byrd... La déception est d'autant plus cruelle qu'il y a moins d'un an, avec "Vicky Cristina Barcelona", Woody Allen signait une pure merveille de désenchantement raffiné sous le soleil de Barcelone... A l'époque, on l'avait cru ressuscité... Fausse alerte, hélas...

"Whatever Works ", de Woody Allen (Sortie en salles le 1er juillet)