Vendredi 11 mai 2012 par Ralph Gambihler

Over The Clouds

Comment guérit-on des vilaines plaies? Il y a tout juste un an, Laurent De Wilde ajoutait son grain de sel  -et Dieu sait à quel point c'est douloureux, le sel sur la plaie- à une polémique lancée par l'un de ses proches contre une mafia supposée dans le monde du jazz dont notre radio était soi-disant l'un des rouages. Ce fut comme un grand froid. Le bagout du claviériste hors-pair, son bagage intellectuel et son indéniable aisance d'esprit se trompaient de cible avec, dans sa prose, un je-ne-sais quoi de hautain et de distance calculée qui nous la rendait d'autant plus vénéneuse.

Comment guérit-on des vilaines plaies? En se retrouvant "Over The Clouds", là-haut dans les nuages, les mesquineries inutiles n'étant plus qu'un point insignifiant vu du ciel ? En savourant une composition intitulée "Le bon Médicament" aussi désarmante de sérénité qu'une Gymnopédie d'Erik Satie? En partant très loin, là-bas, en Afrique, au rythme langoureux d'un piano camouflé balafon pour vous faire encore d'avantage oublier Paris et ses parisianneries avant qu'une reprise de Fela Kuti, au morceau suivant, ne vous propulse vers les sommets du groove?

Comment guérit-on des vilaines plaies? En reprenant matin, midi et soir, plusieurs cuillerées de "Some Kinda Blues",  envoûtante ballade dont l'inventivité pianistique n'éclipse aucunement la ductilité d'un Clarence Penn aux drums et la vivacité du légendaire Ira Coleman à la contrebasse ? On pourra éventuellement compléter l'ordonnance avec quelques vieux remèdes toujours très efficaces du type "Prelude to a Kiss", suprême "ellingtonnerie" qui ne s'endort franchement pas sur ses lauriers au regard de ses prolongements limite funky, en souvenir, peut-être, du passé électrisant du pianiste.

Retour, ici, à l'acoustique et à l'essence même du trio jazz dont sont déployées toutes les arabesques sans jamais perdre l'âme du swing et le fil de la mélodie... Chatoyant et aérien comme il se doit, ce "Over The Clouds" est le plus rassérénant des antidépresseurs.

"Over The Clouds", Laurent De Wilde (Gazebo/L'Autre Distribution)