Mardi 3 janvier 2023 par Ralph Gambihler

White noise

Et dire qu'on avait trouvé Marriage Story un peu mou du genou... Pour son retour sur Netflix, Noah Baumbach ne pourra guère souffrir pareil reproche tant son White noise percute avec fracas le mur de l'absurde et du déjanté. Une collision aussi fatale, cinématographiquement parlant, que celles au pluriel dont un personnage secondaire joué par Don Cheadle glorifie la "spiritualité" au début du film lorsqu'il s'extasie sur un montage d'accidents et d'explosions de voitures au cinéma. Ce ne sera malheureusement pas le seul carambolage dans ce récit lugubre, chaotique, verbeux et décousu.

Au départ, un roman de jeunesse assez visionnaire signé Don DeLillo. L'écrivain est réputé inadaptable au cinéma. On se souvient pourtant de la réussite majeure qu'avait constituée le Cosmopolis tout en acier trempé de David Cronenberg. De nature plus gélatineuse, White Noise relèverait plutôt du gloubi-boulga. Dans sa première partie, Adam Driver y campe un prof d'université visiblement dépassé par les extravertis qui lui tiennent lieu de famille recomposée.

Après quelques échanges métaphysico-macabres avec son épouse (Greta Gerwwig) dans le lit conjugal, tout ce beau monde est emporté dans une catastrophe écologique consécutive à un nuage toxique provoqué par un accident ferroviaire. À peine remis de ses émotions, le spectateur est embarqué dans une ambiance thriller où il est notamment question de pilules psychotropes monnayées par un infâme dealer. Le film, cette fois-ci, vire rouge-sang avant que des nonnes allemandes ne donnent le fin mot de cette épopée "abracadabrantesque" en avouant qu'elles ne croient plus à grand chose...

On l'aura compris, entre consumérisme, peur de la mort et inconscience face à notre descente aux enfers climatique, White Noise se veut le descriptif chargé et plus ou moins vieillot de nos impasses civilisationnelles. Autant on peut en déceler les fulgurances dans la prose d'un DeLillo, surtout à l'époque où le roman a été publié au milieu des années 80, autant l'adaptation de Noah Baumbach ne fait jamais vraiment sens. Rien n'est creusé, tout est boursouflé, et le "bruit de fond" qui donne son titre au film est tout bonnement insupportable, à l'instar de ces personnages qui parlent souvent l'un par dessus l'autre.

White noise, Noah Baumbach (Actuellement sur Netflix)