Samedi 18 octobre 2008 par Ralph Gambihler

Où est la justice pour Troy Davis ?

"Où est la justice pour moi ?", écrit Troy Davis, en janvier 2007, dans une tribune publiée sur le site d'Amnesty International... "Je me suis rendu à la police pour un crime que je savais n'avoir pas commis, avec la volonté de rechercher la justice par le biais du système judiciaire à Savannah, en Georgie, mais on m'a dénié le droit à la justice... Où est la justice pour moi ?"...

Troy Davis est noir. Il est né en 1968. Il est arrêté en 1991 et  condamné à mort, sans aucune preuve tangible,  pour avoir tué un policier blanc. Des témoins vont se rétracter, des juges en appel vont remettre en cause des décisions prises par des cours inférieures, mais rien n'y fait... Troy Davis doit mourir par injection léthale. "Où est la justice pour moi ?", ne cesse-t-il de marteler dans sa tribune de janvier 2007 :  "Je portais une croix au cou, que j’avais faite moi-même, cela m’apportait la paix, et quand un journaliste a titré dans les nouvelles locales  ' le tueur de flic porte une croix au procès ',  la croix m’a immédiatement été retirée, comme si j’étais indigne de croire en Dieu et Lui en moi. Où est la justice pour moi ?"

Le 23 septembre dernier, deux heures avant son exécution, la Cour suprême accède in extremis à la demande des avocats de Troy Davis qui réclament un nouveau procès. Le 6 octobre, la Cour suprême rend son arrêt. On croit dans un premier temps qu'elle a rejeté la requête de l'accusé. Erreur, en fait, elle affirme ne pas s'être encore prononcée sur le sort de Troy Davis. Le 14 octobre, il n'y a plus erreur... La Cour suprême décide de ne pas rouvrir le dossier du prisonnier noir. Elle ne donne aucune raison... Le surlendemain, une nouvelle date d'exécution est fixée: Troy Davis doit être mis à mort le 27 octobre à 19h heure américaine (soit le 28 octobre à 1h du matin heure française) ... Seul le Comité des Grâces (qui ne dépend pas de George Bush) peut encore revenir sur cette décision.

Une journée de mobilisation internationale doit avoir lieu ce jeudi 23 octobre. "Où est la justice pour moi ? " poursuit Troy Davis... « La seule fois où ma famille a été autorisée à entrer dans la salle du tribunal, c’était au moment de la lecture du verdict, où ma mère et ma soeur ont dû implorer pour ma vie, et où le procureur a juste dit que la seule possibilité était de me tuer. Où est la justice pour moi ?" En France, TSFJAZZ est l'un des rares médias à parler de Troy Davis... Est-ce un effet de la banalisation de la peine de mort aux Etats-Unis ? Il ne faut pas gêner Obama ? Et pourtant, une mobilisation internationale a été engagée: Jimmy Carter, Benoît XVI,  le Parlement européen, Harry Belafonte, Suzan Sarandon... Ils ont tous signé pour Troy Davis, y compris des partisans de la peine de mort aux Etats-Unis qui craignent que l'exécution d'un innocent soit un cadeau pour les abolitionnistes...

A TSFJAZZ, quand on parle de l' Etat de Georgie, on fredonne tout de suite la merveilleuse chanson de Ray Charles, "Georgia on my Mind"... Nous ne voulons pas  que l'affreuse vision de la mise à mort de Troy Davis nous hante désormais systématiquement l'esprit lorsque TSFJAZZ se mettra à passer cette chanson. Nous ne voulons pas que cette lancinante question dont il a fait le thème de sa tribune, "Où est la justice pour moi ?" se solde par une mortelle injustice...  "Je comprends sincèrement, conclut Troy Davis dans son texte, qu’une vie a été perdue et j’ai prié pour cette famille comme je prie pour la mienne, mais je suis innocent et tout ce que je demande, c’est un seul jour de vérité dans un tribunal juste. Si je suis irrémédiablement coupable, pourquoi les tribunaux me refusent-ils cela ? La vérité c’est que je suis innocent. Où est la justice pour moi  ?"

Troy Davis a été exécuté le 21 septembre 2011.