New Song
New Song, New Middle East... Le titre du nouveau disque d'Omer Avital et celui du 6e morceau de l'album ont valeur de manifeste. Messager d'un syncrétisme musical qui emprunte aussi bien au bebop qu'à la soul et à la salsa pour enrichir ses racines (une mère yéménite, un père marocain...), le contrebassiste israëlien rêve aussi d'un Moyen-Orient réconcilié dont Israël serait la pierre angulaire en termes d'ouverture et de métissage.
On en est encore bien loin, hélas, et pas seulement parce que le monde arabe compte toujours, en son sein, de nombreuses voix qui continuent à nier le droit à l'existence de l'état hébreu. Nul n'est prophète en son pays, à vrai dire, et surtout pas notre Mingus israëlien qui, après avoir fait les belles nuits du Smalls à New-York, se bat comme un beau diable, aujourd'hui, pour revaloriser sur la terre d'Israël le patrimoine mizrahim des Juifs d'Orient... Ces mêmes Mizrahim dont Ben Gourion affirmait qu'ils étaient « dénués des connaissances les plus élémentaires » et qu'il ne présentaient pas « la moindre trace d'éducation juive ou humaine»...
À ces préjugés coloniaux, Omer Avital répond Bedouin Roots, Yemen Suite... L'esprit du Levant imprègne encore bien d'autres plages de cet album aux couleurs dansantes dont les rythmes ethniques confinent à l'universel. Cela tient-il au trajet d'un taxi jaune new-yorkais nous emmenant au lac de Tibériade, comme l'écrit joliment Vincent Bessières dans les notes de livret ? Les conditions de réalisation du disque (supervisé par notre Sébastien Vidal national) le rendent également plus abouti que East of Suite paru il y a deux ans.
Une quinte royale contribue de toute évidence à ce jeu gagnant avec, autour d'Omer Avital, le trompettiste Avishai Cohen, Yonathan Avishai au piano, Daniel Freedman à la batterie et surtout un ténor qui nous frappe par son aisance, notamment sur la 5e plage du disque (Sabah El-Kheir), et qui se nomme Joel Frahm... On garde longtemps en mémoire, également, cette saveur des orangers à laquelle se parfume le chatoyant Hafla ainsi que le poignant Ballad for a Friend...
New Song, Omer Avital (Plus Loin Music). Concert au Café de la Danse, à Paris, le 28 avril.