Mercredi 22 juillet 2009 par Ralph Gambihler

Le temps qu'il reste (The time that remains)

Des jeunes danseurs palestiniens se trémoussent au rythme d'une techno arabe montée à fond. Ils n'entendent pas, ou alors ils ne veulent pas entendre le mégaphone de la patrouille israëlienne qui rappelle que c'est l'heure du couvre-feu. La scène dure, jusqu'au moment où les soldats se mettent eux aussi à taper du pied au son de la musique. Le rappel incessant du couvre-feu, au mégaphone, devient alors comme une boucle samplée qui s'intègre à la musique sur laquelle dansent les jeunes Palestiniens...

Séquence magnifique : elle donne à voir en même temps l'élan visionnaire d'un cinéaste qui sait regarder l'ennemi israëlien dans ses différentes nuances tout en montrant à quel point une certaine forme de résistance palestinienne s'est complètement désincarnée sous le poids de la résignation... C'est paradoxalement dans la partie la plus faible du film que survient cette scène... Car il faut bien l'admettre, "The time that remains " ("Le temps qu' il reste ") , que le Palestinien Elia Suleiman a présenté au dernier festival de Cannes, ne tient pas toutes ses promesses.

Quand il raconte la résistance de son père lorsque l'armée israëlienne pénètre à Nazareth en 1948, et quand il évoque ensuite la vie quotidienne des Arabes Israëliens dans cette même ville de Nazareth, notamment dans l'appartement familial aux teintes pastels qui ne vibre qu'au rythme de quelques grands événements comme la mort de Nasser ou encore la 1ère Intifada, Elia Suleiman trouve le ton qui convient. Mais lorsque lui-même apparaît dans le dernier tiers du film avec sa dégaine de clown triste et muet qui se la joue Buster Keaton, on commence à lâcher prise.

Le comique de répétition qui faisait mouche jusque là tourne au procédé, et on ne saisit pas non plus très bien le sens de certaines saynettes. On garde au final  le souvenir disséminé d'un trop plein de morceaux de bravoure dont la cohérence peine à se dessiner. Le voisin qui s'asperge d'essence à chaque défaite arabe sans jamais parvenir à brûler une allumette, le canon du tank israëlien qui suit à la trace le jeune type en pleine bougeotte avec son téléphone portable, le saut à la perche par-dessus le Mur de séparation entre Israël et la Cisjordanie, la femme avec sa poussette qui passe entre les chars et des jeunes qui jettent des pierres... D'autres l'ont déjà écrit: Elia Suleiman possède le génie d'un Jacques Tati. ll n'est pas sûr qu'en en restant là il signe le chef d'oeuvre qu'on attend désormais de lui.

The time that remains (Le temps qu' il reste) d'Elia Suleiman (Sortie en salles le 12 août)