La Romancière, le film et le heureux hasard
C'était le Hong Sang-soo tel qu’on se l’imaginait l’autre soir au MK2 Beaubourg, à Paris. Fluet, pudique, à peine audible, l'œil gorgé de malice et d’amabilité, sphinx sud-coréen résistant obstinément à tout décorticage de ses films. Cela se décortique, au fait, la poésie ? En attendant, ce nouvel opus d’Hong Sang-soo, La Romancière, le film et l'heureux hasard, est un joyau de tendresse avec des zestes d'amertume, du thé puis de l'alcool et pour finir, un bouquet de fleurs.
Dans la banlieue de Séoul, une romancière de renom (Lee Hye-young, bien plus avenante que dans Juste sous vos yeux), tente de conjurer une panne d’inspiration au gré de plusieurs rencontres qui la laissent insatisfaite, notamment celle d’un réalisateur requin et imbu de lui-même. C’est une comédienne plus jeune mais elle aussi retirée des circuits qui fait office de déclic. Et en plus, elle est campée par Kim Minh-Hee, l'éternel atout cœur d'Hong Sang-soo, regrettablement absente dans le film précédent. Résultat: la romancière se rêve soudain cinéaste avec sa nouvelle amie comme actrice principale.
Plans fixes, noir et blanc épuré…. On ne se lasse pas de la méthode Hong Sang-soo alors que tout semble naturel, cristallin et parfois nimbé d’une sourde inquiétude: qui est cette petite fille soudainement figée derrière la vitre du restaurant où déjeunent les deux femmes ? Que cache son regard ? Le mot « charismatique », lui, est employé à plusieurs reprises, sonnant tantôt faux, tantôt juste. Il n’empêche que derrière le vernis minimaliste de la mise en scène, et dans sa dimension presque religieuse, cette notion de charisme crève l’écran. On peut aussi appeler cela la grâce.
La Romancière, le film et le heureux hasard, Hong Sang-soo (le film est sorti hier)