Vendredi 29 octobre 2010 par Ralph Gambihler

La princesse de Montpensier

Elle en impose, Marie de Montpensier...  Rebelle, farouche et flamboyante, incarnée toute en luminosité par la pétillante Mélanie Thierry, elle galope de toute sa fougue dans le nouveau film de Bertrand Tavernier... On est ici aux antipodes du bluesy  "Dans la brume électrique" tourné en Louisiane en 2008 et  qui voyait  le réalisateur aux prises avec une certaine façon de faire du cinéma américain. Cela  se ressentait un peu dans le rythme du film. Avec "La princesse..." au contraire, aucun temps mort, et la preuve, une fois de plus, que le film en costumes sied parfaitement au réalisateur de "Que la fête commence".

Déjà à l'époque, Jean Rochefort lui disait fort justement : "la manière dont tu tournes, c'est comme si pour toi la caméra avait été inventée en 1715"... Eh bien il en va de même avec ce drame historique un peu oublié de Mme de Lafayette que Bertrand Tavernier a tourné de façon instinctive, organique, sans se torturer l'esprit et dans une sorte d'état d'urgence après avoir dépoussiéré l'oeuvre originale dans ses grandes largeurs... Situé à l'époque des guerres de religion, fin 16ème, le film s'attache au destin d'une féministe avant l'heure poussée par son père dans les bras d'un prince qu'elle n'aime pas alors qu'elle est toute éprise du fameux Duc de Guise et qu'elle n'est pas sans éveiller l'intérêt d'un troisième larron en la personne du futur Henri III.

Cela fait un peu peur, au départ, ces augustes figures que Patrice Chéreau avait déjà déterrées dans sa peu digestive "Reine Margot"... Seulement voilà, ce sont ici de très jeunes comédiens qui incarnent ces personnages historiques, et ça change tout... Il n'y a qu'à voir, par exemple, le tact et la finesse de Raphaël Personnaz dans son interprétation d'Henri III, à contrario de tous les clichés homosexualisants qui ont toujours circulé sur le prédécesseur d'Henri IV...  Gaspard Ulliel et Grégoire Leprince-Ringuet sont également très bien, jusqu'à d'ailleurs faire un peu d'ombre à Lambert Wilson, qui joue pourtant un personnage important...

Quelle énergie, au final, dans ce portrait de groupe dont émergent avant tout des jeunes gens impulsifs qui avancent vite, qui sont pressés, qui s'écorchent... La mise en scène procède pareillement, caméra à la main, personnages sortant du cadre, y rentrant à nouveau... Même la musique sort du cadre (chronologique), optant pour trombones et percussions au détriment des violons et autres clavecins, jusqu'à ce surprenant clin d'oeil de Philippe Sarde lorsqu'il introduit une pulsion de jazz à deux séquences avec des pizzicati de basse qui sonnent comme un drôle d'hommage à l'ami Ron Carter... Le réalisateur de "Autour de minuit" a dû apprécier....

"La princesse de Montpensier", de Bertrand Tavernier (sortie en salles le 3 novembre) Coup de projecteur le même jour avec le réalisateur à 8h30, 11h30 et 16h30