La Crème de la crème
L'ombre toujours fructueuse de Michel Houellebecq plane sympathiquement sur le nouveau film de Kim Chapiron, joyeux luron du collectif Kourtrajmé et fils de l'avant-gardiste Kiki Picasso. Houellebecq, on le sait, a toujours lié libéralisation économique et libéralisation sexuelle. On a aussi en mémoire son fameux "L'homme est un adolescent diminué" qui marquait son entrée dans le paysage littéraire.
C'est sous ce parrainage explicitement assumé par le jeune scénariste du film, Noël Debré, que "La Crème de la crème" déploie un pitch particulièrement alléchant. Trois étudiants d'une école de commerce déploient ainsi l'artillerie lourde pour aider un de leurs camarades (Karim Ait M'Hand, vraie révélation du film, même s'il n'a pas le premier rôle...) à trouver une fille. Ayant de la suite dans les idées, ils montent dans la foulée un réseau d'escort-girls dans leur campus en ayant bien pris soin d'assimiler les préceptes d'Adam Smith inculqués en cours. Narquoise mais pas stigmatisante, la mise en scène trouve d'emblée le bon rythme pour éclairer cette génération YouPorn dont la misère affective ne connait pas la lutte des classes.
Pour les décideurs de demain comme pour la jeunesse des cités, tomber vraiment amoureux représente, au final, la pire des transgressions. Le film, du même coup, évolue à la fois dans les catégories trash et fleur bleue, jouant du premier comme du deuxième degré (la scène de danse sur "Quelqu'un m'a dit" de Carla Bruni...) et flirtant avec les écueils du teen-movie sans jamais, heureusement, y sombrer.
L'éclectisme de la B.O. nous rappelle également le statut-défouloir d'une célèbre chanson de Michel Sardou, l'intensité du "Ecoute moi Camarade" de Rachid Taha ou encore la palette de plus en plus accomplie d'Ibrahim Maalouf qui prend vraiment les commandes, cette fois-ci, d'un film de son temps avec, en bonus, une fraîcheur qui tranche avec le tout-venant du cinéma français.
La Crème de la crème, de Kim Chapiron (Sortie le 2 avril) Coup de projecteur sur TSFJAZZ, le même jour (12h30), avec le réalisateur.