Jeudi 22 août 2013 par Ralph Gambihler

Jeune et jolie

Le regard, les lèvres, et puis tout le reste... Vénus en chemisier de soie, Marine Vacth crève l'écran, ou plutôt l'embrase, dans le nouveau film de François Ozon. Jusqu'à en calciner le propos. Un sex-symbol arraché au mannequinat carbonise ainsi tout sur son passage... et d'abord son personnage. Embué dans le torride, le spectateur sera, à vrai dire, bien en peine de dénicher du mystère, du trouble et un minimum de profondeur d'âme dans le parcours de cette lycéenne CSP+ s'adonnant à la prostitution de luxe.

On croit deviner, ici ou là, les conséquences d'un dépucelage laborieux, ou alors une envie de faire rimer émotion et consommation dans une époque bouffie de mercantilisme et de paravents factices via Internet et autres textos... Sauf que François Ozon s'abstient soigneusement de creuser ces angles d'approche, jusqu'à susciter un désintérêt croissant quant aux motivations réelles de la demoiselle... La chronique du mal-être adolescent (avec SOS lourdingues en direction de Rimbaud et de Françoise Hardy) ne tient pas d'avantage la route, surtout lorsque le cinéaste filme les réactions de la mère (Géraldine Pailhas) face à la dérive de sa fille et la reconversion de cette dernière dans les amours de son âge.

On tombe alors en plein cinéma bourgeois à la française dont "La Boum" fournissait au moins une version plus "adolescente", justement, mais dans le bon sens du terme. Au final, on a affaire à un film froid aussi bien dans son opacité que dans ses conventions, sans oublier les scènes de sexe avec les clients dont le caractère répétitif confine au scabreux... L'inspiration revient, pourtant, avec un personnage de veuve à la Bunuel auquel Charlotte Rampling prête, en guise d'ultime séquence, toute son élégance et son ambiguïté. Dommage que le film s'arrête là.

"Jeune et Jolie", de François Ozon, en compétition au dernier festival de Cannes (le film est sorti le 21 août)