Into the Wild
On craignait le trip Ushuaïa, la dérive naturaliste, l'égarement bucolo-écolo... C'était mal connaître Sean Penn. Son nouveau film en tant que réalisateur, Into The Wild, est non seulement un pur voyage cinématographique (grâce notamment à un remarquable chef opérateur français Eric Gautier qui a déjà travaillé pour Chéreau et Desplechin), mais aussi un vrai film politique. On s' en aperçoit rien qu' à travers une image furtive, aux deux-tiers du film, lorsqu' en arrière-plan du personnage principal on reconnaît Georges Bush père en train de justifier la première guerre du Golfe...
On est alors de tout coeur, en cet instant, avec Chris McCandless, ce jeune exalté qui décida, au début des années 90, de quitter la civilisation pour partir sillonner le sud des Etats-Unis avant de se faire surprendre par la mort dans un vieux bus abandonné, en plein coeur de l'Alaska. Chris McCandless n'avait pas 25 ans, et on voit bien, dans sa soif d'absolu et son dégoût des "choses matérielles", ce qui a fasciné Sean Penn. On le comprend d'autant plus qu'au fil de son périple McCandless fait des rencontres fabuleuses.
Il croise notamment un couple de hippies, des naturistes, un vieil ermite, une jeune baba cool également... Chacune de ses rencontres dessine une autre Amérique, une autre façon d' occuper ou de ressusciter un espace condamné par ailleurs au désenchantement, jusqu' à cette carcasse de bus-linceul au fin fond de l' Alaska. Sans jamais tricher avec les émotions qui traversent tous les personnages du film (prodigieux William Hurt dans le rôle du père), Sean Penn signe, avec Into The Wild, un chef d'oeuvre de lyrisme qui sait à la fois capter les beautés naturelles les plus grandioses et les battements de coeur les plus intimistes.
Into The Wild, de Sean Penn (Sortie en salles le 9 janvier)