Dream Dance
Trop prolifique, Enrico Pieranunzi ! A TSF, on a failli passer complètement à côté de ce "Dream Dance " qui ne semblait au départ qu'un import de plus dans l'actualité discographique du pianiste italien... Un début de buzz entre quelques amateurs de jazz élégant et fougueux en a heureusement décidé autrement... Et puis Pieranunzi est venu lui-même nous mettre la puce à l'oreille en proclamant à quel point ses équipées transatlantiques avec Marc Johnson et Joey Baron constituaient le "trio de son coeur"...
Ces trois là se connaissent depuis 25 ans sans pour autant s'épuiser dans les cadences infernales. C'est par intermittence qu' ils se rappellent au souvenir de tous ceux qui ne jurent que par Keith Jarrett en matière de trio piano/contrebasse/batterie. Sans injurier d'antédiluviennes hiérarchies, on a quand même l'impression d'une plus grande variété de styles dans le trio d'Enrico Pieranunzi.
D'abord saisie par la richesse mélodique de ses compositions, l'oreille épouse ensuite la vigueur des tempos que le pianiste instille dés le premier morceau, dans une ambiance plutôt délurée... Et puis il y a ce qui nous submerge toujours autant dans les disques d'exception, à savoir le lyrisme de certains morceaux... "No Nonsense " prend ainsi l'allure d'une valse folle ancrée dans le répertoire classique européen avant d'être littéralement détournée par la puissance rythmique de Joey Baron à la batterie...
La contrebasse de Marc Johnson, l'ancien complice de Bill Evans, se met carrément à "chanter " dans le final de "Castle of solitude ", pure mélodie s'il en est, et dont le titre est déjà tout un voyage... La douceur et le doigté du claviériste s'en donnent à coeur joie dans ce qui est l'un de ses titres fétiches, "As never before "... "Nippono ya-oke ", enfin, procède par nappes flottantes confinant au nirvana harmonique... "Dream Dance " a encore bien d'autres atouts dans ses écrins, et notamment l' accessibilité (pourquoi faudrait-il toujours s'exciter sur l'escarpé et la dissonance ?), la virtuosité et l'infinie tendresse que donne à entendre ce magnifique album.
Dream Dance, d'Enrico Pieranunzi & Marc Johnson & Joey Baron (Cam Jazz/Harmonia Mundi)