Don't Look Up-Déni cosmique
Déni cosmique ou cosmétique ? Si le "subversivement correct " existe, Adam McKay en est désormais le chef de file. Son avant-dernier film, Vice, témoignait déjà de ses penchants à jouer au malin en mode frénétique comme pour mieux dissimuler ses défaillances narratives. On en retenait au final un art consommé à épater la galerie au travers d'une charge politique aussi caricaturale que peu dérangeante, ne serait-ce que dans le confusionnisme lui servant de carburant.
Seul contre tous, un duo de scientifiques (Jennifer Lawrence et Leonardo DiCaprio) donne le ton de ce nouveau pudding aussi gluant qu'interminable. Ayant découvert l'existence d'une comète dont le "collapse" avec la planète Terre est prévu dans un délai de six mois, nos deux héros se heurtent à un déni général, à commencer par celui de la présidente des Etats-Unis (Meryl Streep en roue libre...), une sorte de Trump au féminin uniquement préoccupée par ses intérêts électoraux.
La sphère médiatique, incarnée par deux présentateurs de talk traitant tout sujet sous le sceau du cynisme et de la dérision, n'est guère plus réceptive, et les réseaux sociaux encore moins. Des profiteurs s'en mêlent, à l'image d'un gourou techno-milliardaire (Mark Rylance) plus empressé de faire main basse sur les métaux précieux de cette comète que de la détruire. Incrédulité et cupidité se donnent ainsi joyeusement la main, comme si l'inaction climatique qui constitue l'arrière-plan de la métaphore se résumait à cet axe diabolique.
Le manifeste, on l'aura compris, n'en est pas à une contradiction près. Pfizer et les antivax, même combat, si on extrapole à l'actualité sanitaire du moment ? La mise en scène ne relève pas le niveau, loin de là, tant l'ensemble est mal fichu, forçant la caricature, le montage épileptique et les ruptures de ton exténuantes. Des scènes doublonnent (Jennifer Lawrence qui s'énerve sur le plateau télé, comme DiCaprio plus loin dans le récit), des personnages changent d'attitude de manière inexplicable (DiCaprio qui revient soudainement au bercail, Timothée Chalamet tour à tour bad boy, boyfriend, puis religieux)... Derrière les outrances, la trame craque sous toutes les coutures.
L'instant trémolo, enfin, parachève l'échec du film. A contrario de ce qui a précédé, McKay rassemble les "gentils" autour d'une tarte aux pommes et d'un bon café alors même que la comète s'apprête à frapper. On prie, on se la joue sérénité et authenticité alors que partout ailleurs c'est le sauve-qui-peut. Comment ne pas compatir au rythme langoureux des Mills Brothers au sujet desquels DiCaprio nous a gratifié précédemment d'un exposé fastidieux ? Faut-il y voir de la part de McKay un écho lointain de We'll Meet Again chanté par Vera Lynn à la fin du Dr Folamour ? Kubrick utilisait le procédé de manière bien plus grinçante, les deux réalisateurs ne boxant définitivement pas dans la même catégorie.
Don't Look Up: Déni cosmique, Adam McKay (actuellement sur Netflix)