Mardi 23 avril 2024 par Ralph Gambihler

Back to Black

La note bleue dans la peau, même lorsqu'elle s'en est éloignée... À son amant qui lui lance "Je croyais que t'étais rock'n'roll ", Amy Winehouse répond: "Je suis jazz "... Ainsi swingue-t-elle d'emblée, la chanteuse trop tôt disparue ne jurant que par Monk et Sarah Vaughan, dans le biopic que lui consacre la photographe et réalisatrice Sam Taylor Johnson dont le CV -elle a adapté à l'écran 50 nuances de grey- laissait craindre le pire. Une sensibilité toute en énergie parvient pourtant à donner corps à la fougue, à la déglingue et à la vulnérabilité d'Amy Winehouse, notamment grâce à la bluffante Marisa Abela qui la ressuscite à l'écran et qui interprète de façon très convaincante les chansons du film.

Le récit n'a que peu à voir, en revanche, avec la trajectoire infernale qu'Asif Kapadia avait reconstituée dans le fabuleux et poignant documentaire Amy  sorti en 2015. La réalisatrice se concentre ici sur un instantané, à savoir la liaison amoureuse, et finalement destructrice, entre Amy Winehouse et Blake Fielder-Civil. Leur première rencontre dans un café est l'un des temps forts du film, notamment quand il lui fait découvrir le groupe féminin The Shangri-Las qui, derrière sa légèreté apparente, chantait l'inquiétude adolescente dans les années 60.

Le propos perd un peu de sa force par la suite, surtout lorsqu'on comprend que le processus de création musicale d'Amy Winehouse ne sera qu'à peine esquissé, tout comme sa présence sur scène et ses relations avec l'industrie du disque. Le portrait un peu angélique de son père laisse également songeur au regard de ce qu'il en fut réellement. Difficile en même temps de nier l'émotion qu'inspire ce bout de parcours dont le tact nous évite par ailleurs l'ultime chapitre d'une descente aux enfers.

Back to Black, Sam Taylor Johnson (sortie en salles ce mercredi)