Vendredi 4 janvier 2019 par Ralph Gambihler

Asako I & II

Un homme disparaît: Baku, bad boy au physique de mannequin rencontré à la sortie d'une expo. Pour sa dulcinée si peu revêche, Asako, le voir ainsi s'évanouir dans la nature est un crève-coeur. De quoi la rendre allergique à tout nouveau coup de foudre alors même que la romance était à peine entamée. C'est donc bien sur un autre mode, moins passionnel mais plus complice, qu'elle refait sa vie deux ans plus tard avec un jeune homme au profil plus assagi... même s'il a exactement le même visage que l'amant d'autrefois.

Jeune fille en fleur et sosie troublant... Entre Rohmer et Hitchcock, celui de Sueurs Froides, Ryusuke Hamaguchi signe un récit lumineux que d'autres réalisateurs auraient sans doute traité avec d'avantage de fracas. La délicatesse de la mise en scène -son répertoire tout en acoustique, surtout-  lui donne en même temps toute sa saveur.

Comment aimer ? Comment mûrir ? La psyché d'Asako se déploie dans ces méandres. Dans l'une des plus belles scènes du film, une muraille en béton lui cache la vue de la mer, et lorsque surgit soudainement l'occasion de revenir en arrière, ce sont toutes les résolutions de la jeune femme qui vacillent, jusqu'à remettre en cause cette notion-même de maturité qui la rendait plus sereine.

Seul bémol à cette vraie-fausse bluette, les personnages secondaires, trop peu développés. Pour le reste, il est regrettable qu'un séisme intérieur féminin si finement développé soit passé à ce point inaperçu au dernier festival de Cannes. En matière de réussites asiatiques,  le Asako I & II de Ryusuke Hamaguchi y avait autant sa place que le Burning de Lee Chang-dong, sans même parler de la palme plus que contestable attribuée à Hirokazu Kore-Eda pour Une affaire de famille.

Asako I & II, de Ryusuke Hamaguchi, sélection officielle Cannes 2018 (sortie en salles ce 2 janvier)