Arthur Penn ou l'Amérique à visage humain...
Lorsqu’au détour des années 80 l’establishment hollywoodien décida d’en finir avec un cinéma de "loosers", entre guillemets, il prit essentiellement pour cible Arthur Penn. Les Coppola, Scorsese et autres tenants du "Nouvel Hollywood" allaient plus ou moins trouver matière à rebondir, mais l'auteur de « Bonnie and Clyde », qui vient de s'éteindre à l'âge de 88 ans, sera, quant à lui, condamné au silence, après avoir tenté de mettre au cœur de tous ses films une Amérique vulnérable et gorgée de sensibilité…
Plus qu’une Amérique de "loosers", une Amérique à visage humain tout simplement… La légende débute en 1958, avec « Le Gaucher ». Fort de son expérience acquises sur les plateaux de télévision, Arthur Penn donne un nouveau souffle au mythe de Billy the kid, révélant au passage Paul Newman, et introduisant pour la 1ère fois des éléments psychanalytiques dans le genre ultra-formaté du western. Avec « Miracle en Alabama », quatre ans plus tard, le cinéaste évoque la place des exclus et la faillite du mythe américain à travers le destin d’une jeune aveugle, sourde, et muette, qui tente désespérément de communiquer avec son entourage. Le rôle vaudra un oscar à Anne Bancroft.
C’est toujours l’Amérique malade, ivre de racisme et de cupidité, contre laquelle se bat le duo Marlon Brando/Robert Redford dans « La Poursuite Impitoyable »… Une Amérique ulta-violente et aussi déboussolée que Warren Beatty et Faye Dunaway dans "Bonnie and Clyde "en 1967… C’est Dustin Hoffmann enfin, dans le rôle d’un Indien vieillissant, qui illustrera en 1970 les avatars de la bannière étoilée dans « Little Big Man »…
Ces dernières années, Arthur Penn s’était tourné, au grand regret de ses admirateurs, vers un cinéma plus commercial qui faisait d’autant plus regretter ses deux derniers grands films, « Missouri Breaks », en 1976, avec Marlon Brando et Jack Nicholson, et surtout le très poignant « Georgia », en 1980, où encore une fois le réalisateur écornait le mythe de l’American way of Life à travers les yeux d’un jeune immigré yougoslave fraîchement débarqué aux Etats-Unis. On se souviendra également du trop méconnu "Mickey One", avec le jeune Warren Beatty et le fameux "Once Upon a Time" d'Eddie Sauter interprété par un certain Stan Getz.
Arthur Penn (27 septembre 1922-28 septembre 2010)