3 Billboards, les Panneaux de la Vengeance
Grands espaces, duels en tout genre, musique à la Ennio Morricone... Le premier joyau ciné de l'an 2018 tient beaucoup du western -et surtout du western-spaghetti- à ceci près que Clint Eastwood, cette fois-ci, est une femme et que l'odyssée jubilatoire à laquelle nous convie le Britannique Martin McDonagh est résolument contemporaine.
C'est Frances McDormand, la flic enceinte de Fargo qui donne chair au personnage principal et encore une fois elle "en a dans le ventre", comme le titrait Libé lorsqu'était sorti le film des frères Coen. Elle campe ici une mère courage du Missouri bien décidée à pointer du doigt la nullité des policiers censés enquêter sur le viol et le meurtre de sa fille. Trois panneaux publicitaires qu'elle recouvre de punchlines enragées lui servent de défouloir. De quoi relever sérieusement le taux d'adrénaline local.
Fuyant tout pathos, 3 Billboards... opte d'emblée pour l'humour noir avec ses personnages qui partent en vrille, ses répliques-culte et sa manière décapante de prendre à revers le rêve américain. Les frères Coen, certes (on pense aussi à Billy Wilder...), mais le cynisme en moins. Car on cherchera en vain, tout au long de ce film si génialement écrit, un quelconque "méchant" même si on croit le repérer, à un moment, dans le personnage de bad cop à deux neurones joué par Sam Rockwell.
Le personnage de Frances McDormand n'a lui-même rien d'angélique. C'est d'ailleurs avec une British touch particulièrement affûtée et une mise en scène toute en veloutés que Martin McDdonagh ausculte cette immuable Americana des petites villes... Un Vieux Sud pas vraiment immunisé contre le racisme et l'intolérance mais qui témoigne aussi d'une farouche volonté de s'en sortir par soi-même, aux antipodes de tout esprit de système. C'est ce mélange de distance et de chaleur humaine qui fait des étincelles, avec en bonus Peter Dinklage, le nain de Game of Thrones. Là encore, un personnage fabuleux qui rattache au passage 3 Billboards à l'esprit, à l'esthétique et à l'efficacité des grandes séries américaines. Martin McDonagh en signe le pilote rêvé.
3 Billboards les Panneaux de la Vengeance, Martin McDonagh (Sortie en salles le 17 janvier). Coup de projecteur sur TSFJAZZ (13h30), le même jour, avec Thierry Chèze, du magazine Studio Cine Live